Après une période de repos de deux mois, Jérémie Beyou a entamé début février sa préparation physique en vue du Vendée Globe. L’objectif du skipper de Charal, qui s’est entouré de nombreux spécialistes, est double : tenir sur la durée et prévenir les blessures.
Depuis maintenant plusieurs éditions du Vendée Globe, la plupart des marins, en particulier ceux dont les objectifs sportifs sont élevés, ont fait d’une préparation physique poussée et réfléchie un élément indispensable de leur préparation globale du tour du monde en solitaire. « On est clairement obligé d’en passer par là. A la fois pour prévenir les blessures, mais aussi parce qu’il faut avoir la puissance nécessaire pour mener en solitaire un bateau de 18 mètres pendant 70-80 jours », confirme Jérémie Beyou, qui travaille depuis de nombreuses années avec un coach sportif, Stéphane Eliot.
Décidé à se doter de toutes les armes possibles pour performer sur le prochain Vendée Globe, le skipper de Charal, conseillé par Christopher Pratt, son co-skipper sur la Transat Jacques Vabre 2019, a en plus appel fait en fin d’année dernière à l’expertise de Human Fab, une structure à Aix-en-Provence composée de nombreux spécialistes (médecins du sport, kinés, psychologues, diétécien-ne-s…) et tournée notamment vers la haute performance sportive.
« J’ai passé une journée là-bas mi-décembre, au cours de laquelle, après des examens biologiques, j’ai effectué de nombreux tests (équilibre, force, réactivité, détente, souplesse, VO2max) et rencontré plusieurs spécialistes, en premier lieu William Vanbliervliet, le médecin qui chapeaute mon suivi. A la fin de la journée, ils te donnent un premier bilan et des hypothèses de travail et ensuite, tu reçois un document très détaillé avec toutes les analyses et un programme global de préparation sur l’année, que je mets en pratique à Lorient, avec Stéphane. »
Cette programmation a débuté par une période de deux mois de « ressourcement après une fin d’année chargée avec la transat Jacques Vabre et le convoyage retour », explique William Vanbliervliet. Elle s’est poursuivie début février par un gros travail foncier, d’abord à base de vélo sur home trainer, avec un objectif en passe d’être rempli par Jérémie de parcourir un total de 1200 km, à la vitesse moyenne de 30 km/h. Sont ensuite venues s’ajouter des séances de gainage et de proprioception, cette dernière, selon Stéphane Eliot, consistant à « chercher le déséquilibre, avec ou sans charge, pour travailler la musculature profonde et squelettique ».
Dans un troisième temps, était prévu à partir de mi-mars et jusqu’à la mise à l’eau de l’Imoca Charal, initialement programmée début avril, une nette montée en charge : « On devait passer sur de la puissance musculaire avec des séances en circuit training (ou crossfit), l’objectif étant de le mener jusqu’à la Transat New York-Vendée », poursuit Stéphane Eliot. Cette dernière devait en effet constituer un objectif intermédiaire sur la route du Vendée Globe, résumé par Jérémie Beyou : « C’est comme si tu as les Jeux Olympiques en fin d’année et un Championnat de France au milieu. L’objectif est d’être au pic pour les Jeux mais comme le Championnat de France est quand même important, tu essaies aussi d’être affûté pour cette compétition, tout en sachant que tu ne seras pas aussi bien que pour les Jeux. »
La pandémie de coronavirus, qui a contraint le skipper de Charal et son équipe à se confiner, perturbe forcément la préparation, mais William Vanbliervliet n’est pas inquiet : « Ça va demander des petites modifications de planning, il faudra peut-être remettre en place une session intensive en mai pour qu’il remonte son niveau, mais la préparation est longue, Jérémie va avoir le temps de redresser la barre. » D’autant que le Finistérien continue à s’entraîner chez lui, entre home trainer, gainage, musculation, étirements…
Pour cet été, était prévue une période de repos en juillet – agrémentée de pratiques ludiques (vélo, surf, kite, paddle…) – suivie d’une reprise en août, directement en circuit training, à coup de séances modérées d’abord, puis à la fois intensives et de récupération, en fonction du programme de navigations, avant la dernière ligne droite vers le Vendée Globe qu’il s’agit de négocier au mieux. « Nous pensons qu’il ne faut pas s’arrêter jusqu’au départ ; par contre, il faut réduire l’intensité, estime Jérémie. Ce qui est important, c’est de décider le bon moment où tu ralentis et le niveau de la baisse intensité, est-ce que c’est 70%, 40% ? Il faut régler le curseur pour garder les acquis tout en faisant attention à ne pas fatiguer le skipper. » « L’idée est que Jérémie soit au top de sa forme le 8 novembre, au départ du Vendée Globe », conclut Stéphane Eliot.
Et une fois en mer, le skipper ne laisse rien au hasard : « J’ai une petite routine quotidienne d’étirements, importante à respecter pour éviter les blessures musculaires. Et quand j’attaque une manœuvre, idéalement, je modère mon intensité au début afin de chauffer progressivement les muscles, mais souvent, il faut « piocher dedans » d’entrée alors que tu n’es pas encore chaud. C’est pour ça que c’est capital d’avoir une bonne base musculaire, mais aussi de bien connaître son bateau pour être bien positionné et faire les choses dans le bon ordre. » D’où l’importance de toute cette préparation en amont…
Vendée Globe : Une préparation multi-cartes pour Jérémie Beyou