Jérémie Beyou avait décidé en vue du Vendée Globe 2020 de pousser sa préparation physique un peu plus loin en faisant appel à l’expertise de HumanFab, une structure basée à Aix-en-Provence tournée vers la haute performance sportive. Un peu plus de dix jours après l’arrivée du skipper de Charal, William Vanbiervliet, le médecin chargé de son suivi, fait le bilan de cette démarche collaborative.
Dans quel état physique avez-vous trouvé Jérémie à son arrivée aux Sables d’Olonne ?
Nous avons fait un bilan biologique avec lui afin de voir s’il n’avait pas de syndromes inflammatoires secondaires, de carences vitaminiques, de troubles digestifs chroniques, ce bilan est plus que satisfaisant, puisque nous n’avons pas constaté de carences majeures. Il correspond à ce que nous attendions après un effort de ce type et les restrictions qu’il a fait subir à son corps pendant trois mois. Sa forme physique est très correcte, il n’a pas souffert de problèmes de dos ou de douleurs articulaires de façon prononcée ou longue. Physiquement, il a tenu bon.
A-t-il perdu du poids ?
Oui, une dizaine de kilos. Il avait repris un peu au moment où il est revenu aux Sables d’Olonne la première fois, je pense qu’il avait cherché à compenser parce qu’il avait pris un sérieux coup au moral. Ensuite il a perdu logiquement, les activités physiques et la mobilité sont forcément réduites sur une telle épreuve marathon, mais cette perte de poids ne s’est accompagnée d’aucune carence.
A-t-il subi des blessures pendant ses trois mois de mer ?
Non, la traumatologie a été heureusement bégnine, il a pris des coups au cou, sur un doigt, des « petits bobos » qu’il est arrivé à gérer seul ou en prenant des médicaments pour soulager la douleur. Le but de notre démarche était notamment d’éviter les douleurs d’usure, particulièrement lombaires, qui peuvent s’installer pendant plusieurs jours et vont miner le moral du skipper, donc réduire ses capacités physiques et de concentration. Or, il n’a eu de pépins chroniques ni pendant sa préparation ni pendant la course, à part ces chocs un peu inévitables dans certaines conditions. On peut donc parler de mission accomplie, je pense que Jérémie était bien préparé physiquement pour ce Vendée Globe, c’était un aspect très important à ses yeux.
Quel est désormais le mot d’ordre pour lui ?
Comme n’y a pas d’objectif imminent, à lui de se régénérer et de retrouver du plaisir sur d’autres activités physiques dont il a été privé pendant trois mois, comme le vélo qu’il aime beaucoup pratiquer. Sans non plus être trop acharné, mais je pense que Jérémie l’a bien compris ! Mentalement, le Vendée Globe est une épreuve, il est hors de question d’aller mettre l’esprit à rude épreuve en lui faisant subir des efforts particuliers. Et sur un plan rééducatif, on l’a orienté sur une gymnastique de ré-harmonisation des chaînes musculaires. Il sort d’un Vendée Globe où il a souvent été dans des positions plutôt fléchies, des situations dans lesquelles il n’a pas eu une mobilité normale ; des muscles, comme les psoas et les ischio-jambiers, ont tendance à se rétracter, donc il faut lui proposer une gymnastique adaptée pour les remettre en activité, mais de façon douce. Ce sont des méthodes basées sur la respiration, sur des séances d’étirements progressifs. En plus de cela, Jérémie doit retrouver un sommeil normal, mais là-dessus, il a beaucoup d’expérience et la vie de famille oblige très vite à revenir dans les clous !
Quand reprendra-t-il une préparation en vue de la suite de la saison ?
Je pense qu’au bout d’environ deux mois, il pourra se relancer sur un protocole de ré-athlétisation et sur de nouveaux objectifs. Mais le Vendée Globe est un exercice tellement exigeant que c’est vraiment important qu’il profite de cette période pour se ressourcer mentalement, donc je lui ai conseillé d’y aller cool !