Jérémie Beyou et Franck Cammas sont venus à bout de la route du café, qui fêtait cette année son trentième anniversaire. Charal a franchi la ligne à 12h56 locale (17h56 heure française) à la 4e place. Toujours aux avant-postes de la course, le duo a dû faire face à une avarie sur sa voile principale de portant. Une péripétie qui l’a obligé à batailler jusqu’au bout pour signer cette belle place d’honneur. Désormais, un nouveau chapitre s’ouvre avec le retour des courses en solitaire jusqu’à la plus prestigieuse d’entre elles, le Vendée Globe en novembre prochain.
Jérémie Beyou et Franck Cammas ont suffisamment d’expérience pour savoir qu’il reste toujours une part d’inconnu en course au large. Eux aussi ont répété que la discipline était « un sport mécanique » et qu’il faut parfois composer avec des aléas qui ne tombent jamais au bon moment. Dans cette Transat Jacques Vabre, c’est une avarie sur la voile principale de portant (le gennaker), la rendant inutilisable, qui a mis à mal la progression de Charal, pourtant auteur d’un sans-faute jusque-là.
Aux avant-postes dès les premières heures de course
En effet, tout avait bien commencé. La montée en puissance du bateau noir et rouge s’est confirmée, le travail d’optimisation et de fiabilisation portait ses fruits. La 2eme place à la Guyader Bermudes 1000 Race en mai et la victoire aux 48H Azimut avaient donné le ton. Surtout, l’implication du team avait contribué à arriver au Havre avec sérénité. Le report du départ d’une semaine n’avait pas entamé leur motivation. Et sur l’eau, ça s’est rapidement constaté. Malgré les conditions musclées du départ, la mer croisée, les rafales à près de 40 nœuds, la fatigue, Jérémie et Franck tiennent bon et conservent la tête sans discontinuer.
Au niveau de la performance de Charal et de sa constance s’ajoutent le sang-froid et le talent du duo. Après avoir dominé la course, ils prennent les commandes du « groupe du Sud », négocient le passage des Canaries avant de bénéficier des alizés. La bataille est féroce avec le tenant du titre For People (Thomas Ruyant – Morgan Lagravière) et Paprec Arkéa (Yoann Richomme – Yann Eliès) mais Charal est dans le coup. Et puis il y a cette avarie, « la voile principale de portant devenue inutilisable » dixit Jérémie et un arrêt conséquent dans leur progression. Ralentis une dizaine d’heures, ils ont repris leur marche en avant. Les leaders les ont distancés mais, fidèles à leur réputation, Jérémie et Franck ne lâchent rien. Ils s’accrochent dans un groupe de poursuivants pour terminer avec les honneurs. C’est donc aujourd’hui nuit, à 12h56 en Martinique, qu’ils ont conclu leur périple.
Avec le Vendée Globe 2024 dans un coin de la tête
Certes, ces deux compétiteurs dans l’âme avaient forcément une pointe de déception à l’idée de ne pas avoir pu faire mieux. Mais cette transatlantique, la 2eme de ce bateau depuis sa mise à l’eau l’an dernier, a offert de nombreux enseignements au fil d’une course où la concurrence a une nouvelle fois été impressionnante. L’IMOCA est fiable, puissant et performant dans une large variété d’allures.
En somme, il semble plus que jamais taillé pour son objectif majeur : le Vendée Globe, dont le départ aura lieu à l’automne prochain. Afin de s’y préparer, le contre-la-montre se poursuit. L’équipe va s’affairer à préparer le bateau avant une nouvelle course, Retour à la base, dont le départ aura lieu le 30 novembre et l’arrivée se tiendra à Lorient. De quoi continuer à progresser et à monter en puissance avant de se projeter sur la saison prochaine.
La course de Charal en chiffres :
- Horaire d’arrivée (heure locale) : 12 h 56 min 34 secTemps de course : 12 jours 8 h 26 min 34 secVitesse moyenne réelle : 18,5 nœuds
- Distance parcourue totale : 5 477,2 milles
- Horaire d’arrivée (heure française) : 17 h 56 min 34 sec
Réactions à chaud – sur les pontons
Jérémie Beyou :
« Il y a forcément de la frustration de ne pas avoir pu jouer les premiers rôles jusqu’à la fin. Nous avons beaucoup régaté et depuis deux jours, on se rendait coup pour coup avec Samantha Davies et Jack Bouttell. Au-dessus de 20 nœuds, on était un poil plus à l’aise. Nous avons bien régaté avec eux mais ce n’était pas l’objectif initial. Nous avons subi une casse sur une voile primordiale pour la fin de la course et il a fallu composer avec et parcourir plus de distance que les autres. Thomas (Ruyant) et Morgan (Lagravière) ont réalisé une très belle course ! Je suis très content de cette saison en double. J’ai beaucoup progressé aux côtés de Franck, le bateau a progressé aussi… C’est une belle rampe de lancement pour la saison solo qui va débuter ! »
Franck Cammas : « Nous n’étions pas partis pour terminer quatrièmes mais vu ce qu’il nous est arrivé dans les Alizées, on ne pouvait pas espérer mieux… C’est sympa d’avoir terminé comme ça. On a bien commencé, bien terminé. Sauf que nous avons fait tout le parcours avec une voile du reaching qui est 100 m2 plus petite qu’une voile de portant donc il a fallu trouver des façons de naviguer pour compenser. Mais quand on ne gagne pas, on apprend beaucoup de choses et ça a été le cas avec cette toile dégradée. On a appris à aller de plus en plus vite, on s’est battu et ce qu’on a montré à la fin, c’est particulièrement rassurant ! Je sais que Jérémie s’en sortira très bien en solitaire ! »